1 Jean 1,1 à 2,11

1 Jean 1,1 à 2,11

 

Dès les premiers versets on entre dans le vif du sujet, sans perdre de temps en salutations et mentions d’auteur et de destinataire ! Mais si l’auteur ne se présente pas, c’est sans doute qu’il était bien connu ! et c’est surtout que son message est sa meilleure carte de visite.

Les premiers mots rappellent le prologue de l’Evangile de Jean, on peut s’amuser à faire une liste des mots qui reviennent dans les deux textes : commencement, parole (logos), vie, témoignage…

Ce début est très solennel, celui qui écrit s’exprime avec l’autorité du témoin, il parle de ce qu’il connaît personnellement, il annonce ce qu’il a entendu, vu de ses yeux, et même touché (v.1 : littéralement « ce que nos mains ont palpé »).

Il insiste d’une part sur l’authenticité de son témoignage, parce que c’est un témoignage direct, et sur l’incarnation, la valorisation de la pleine humanité de Jésus Christ, c’est la réponse de Jean à ceux qui refusent que Dieu ait pu s’abaisser jusqu’à être véritablement et pleinement un humain.

Et l’auteur ne parle pas en son nom seul, l’emploi du « nous » lui permet de s’appuyer sur l’autorité des apôtres, de toute l’Eglise, comme pour valider ce qu’il affirme.

Son message est celui des Evangiles : la « parole de vie » s’est faite homme, le Fils a vécu sur notre terre, une vie humaine comme les nôtres. Jésus de Nazareth, l’homme crucifié, est le Fils du Père. Voilà la révélation de l’Evangile, voilà la bonne nouvelle : Dieu n’est pas un principe abstrait, il est le Père que nous a révélé Jésus, il est celui qui permet, qui offre la communion, entre nous et avec lui.

Ce message est source de joie, autant pour celui qui le transmet que pour ceux qui le reçoivent.

 

Dieu est lumière. Ce constat, cette affirmation, n’est pas une spécificité chrétienne, toutes les religions associent la lumière à la divinité, la lumière évoque la chaleur, la vie, la joie, alors que la nuit est associée aux puissances maléfiques, à la peur, au danger. Jean utilise ici un langage familier pour ses lecteurs, mais en lui donnant un sens nouveau.

La lumière révèle les choses et les êtres, elle fait tomber les masques, elle dévoile les illusions et les erreurs, et elle invite à « faire la vérité ». Cette expression fait référence au Premier Testament, où elle désigne « le comportement moral fidèle à la loi », Jean y entend l’appel à la conversion et l’étape obligée de la confession des péchés.

« Faire la vérité » c’est être honnête avec soi-même et devant Dieu, c’est se reconnaître pécheur, avec la confiance de celui qui se sait aussi au bénéfice du pardon de Dieu. « Si nous disons : « nous n’avons pas de péché », « nous ne sommes pas pécheurs » … » A travers ces lignes, Jean nous transmet sans doute quelques-unes des idées « hérétiques » contre lesquelles il lutte dans cette lettre. Certes nous sommes assurés du pardon, certes « nous avons un défenseur devant le Père », mais cela ne signifie pas que nous sommes désormais au-delà des contingences humaines – et notre péché en fait partie. En niant l’incarnation et la croix, les gnostiques se considéraient comme des « spirituels », parvenus à un stade supérieur. Jean nous ramène à notre vraie dimension humaine, à la fois pécheresse et pardonnée, comme le dira Luther.

Et en affirmant que le salut acquis à la croix est pour « le monde entier », Jean met un autre coup de pied dans l’édifice gnostique, en rappelant que Jésus n’est pas venu pour une élite, pour quelques privilégiés, mais pour tous. Par la foi, nous pouvons être en communion avec Dieu, sans avoir à passer par des initiations secrètes et compliquées.

 

Être en communion avec Dieu, cela n’a rien de passif, il s’agit au contraire d’une participation active au travail de Dieu pour le salut du monde, comme on parle de « participation » dans une entreprise… nous sommes à la fois ouvriers et bénéficiaires ! Connaître Dieu cela se traduit par des actes.

Connaître Dieu, nous dit Jean, c’est obéir à ses commandements. Connaître, c’est un verbe important pour les gnostiques, qui se targuaient de connaître les mystères divins, c’est aussi un verbe important pour la Bible. Il signifie le lien intime entre les deux membres d’un couple, mais aussi l’engagement de l’un envers l’autre.

Connaître, dans la Bible, cela fait appel à l’engagement de toute la personne, et non pas seulement à l’intelligence. Connaître Dieu c’est s’engager envers lui, en lui obéissant – de même que Dieu s’engage envers nous, à nous secourir, nous appeler, établir avec nous une relation de confiance, une alliance. Le contrat d’alliance que Dieu passe avec nous ce sont ses commandements, principalement le commandement d’amour.

Le grec connaît trois mots différents pour dire l’amour : érôs, l’amour sexuel, philia, l’amitié, et enfin agapè, qui implique une attitude intérieure, une notion de préférence, de choix ; c’est ce mot que le Nouveau Testament a retenu pour désigner l’amour de Dieu pour sa créature, et l’amour humain inspiré par Dieu. C’est la qualité d’amour que Jésus a révélée en donnant sa vie pour les siens. C’est le fondement des relations nouvelles que le Christ est venu instaurer.

C’est un commandement « ancien », puisque nous l’avons entendu maintes fois, depuis 2000 ans qu’il est proclamé ! et pourtant toujours nouveau, toujours à réentendre avec des oreilles neuves, toujours à redécouvrir dans ce qu’il implique dans notre vie concrète.

Celui qui se réclame de Jésus « doit marcher lui-même dans la voie où lui, Jésus, a marché ».

La communion avec Dieu passe par la communion les uns avec les autres. On ne peut pas être croyant tout seul, pour soi-même. Si nous connaissons Dieu, cela se traduit dans nos actes, dans notre façon de vivre les uns avec les autres.

Et si l’amour est la « marque de fabrique » du monde voulu par Dieu, la haine est celle de notre monde, et nous ne savons que trop bien combien la haine aveugle… La haine appartient aux ténèbres, affirme Jean, on ne peut pas se dire chrétien et vivre dans la haine.

 

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