Apocalypse 21, 10-23 – La gloire de Dieu l’illumine

 

Pasteur Bernard Mourou

Le tournage des films documentaires bénéficie aujourd’hui des drones, qui offrent des points d’observation inaccessibles jusque-là.

Ce processus a commencé au XIXe siècle avec Nadar. C’est lui en effet qui, après avoir révolutionné le portrait, a inventé la photographie aérienne : en 1858, il a eu l’idée d’utiliser une montgolfière. Il s’agissait en fait d’un ballon captif placé à 80 m de hauteur, l’équivalent d’un immeuble de 25 étages.

Comme sujet de sa première photographie aérienne, Nadar a choisi un quartier de Paris qui s’appelait le Petit-Bicêtre et qui est aujourd’hui le Petit-Clamart. Nadar pouvait ainsi avoir une vue d’ensemble sur son objet d’étude.

A l’époque, c’était une révolution. Personne n’avait jamais bénéficié d’une telle vue sur la capitale. Aucun immeuble n’atteignait cette hauteur, et la Tour Eiffel n’était pas encore construite.

Notre passage d’aujourd’hui garde le même thème que celui de dimanche dernier, celui de la nouvelle Jérusalem. Comme Nadar, l’auteur de l’Apocalypse prend de la hauteur pour nous la faire contempler.

Notre auteur nous dit qu’un ange l’a emmené en esprit sur une grande et haute montagne, de la même manière qu’il avait déjà été emmené dans un désert quelques chapitres plus tôt.

Avant lui, c’était aussi depuis une haute montagne que le prophète Ezéchiel avait eu la vision du nouveau temple. Ce point de vue élevé permet ici à notre auteur d’embrasser la totalité de la nouvelle Jérusalem et ainsi d’en comprendre son organisation.

Aujourd’hui, les touristes qui découvrent une ville sans avoir de plan à leur disposition ne savent jamais exactement où ils se trouvent. La beauté d’une ville vient de ses monuments, mais aussi de la manière dont elle est organisée.

Certaines villes se sont développées de manière anarchique. On en trouve beaucoup dans les pays émergeants. A l’inverse, d’autres ont été planifiées de manière artificielle comme Brasilia. Mais les plus belles sont celles qui ont su respecter des règles architecturales tout en laissant place à la vie. C’est le cas de nombreuses villes européennes.

La nouvelle Jérusalem a son origine en Dieu. Pour souligner son caractère divin, notre auteur nous la montre descendant du ciel, d’auprès de Dieu, et il la qualifie de ville sainte.

Son apparence aussi atteste de son origine divine. En effet elle joue avec la lumière d’une pierre précieuse : le jaspe cristallin.

Le jaspe peut avoir à peu près toutes les couleurs possibles. Il en existe du rouge, du vert, du bleu, du jaune, du blanc, du beige, du noir et certains sont même multicolores. Mais dans l’Antiquité le jaspe désigne aussi une pierre transparente ou translucide, voire semblable à une émeraude[3]. Cette interprétation convient davantage ici en raison de ce que le texte nous dit sur le rôle joué par la lumière dans la nouvelle Jérusalem.

La même idée se retrouve dans le fait que cette ville est faite du métal le plus précieux, l’or, mais que cet or est semblable à du verre pur et transparent, donc qu’il laisse passer la totalité de la lumière.

Cette nouvelle Jérusalem est protégée par une grande et haute muraille qui s’accorde aux quatre points cardinaux, mais elle a aussi douze portes qui permettent d’entrer et de sortir librement. A ces douze portes répondent douze fondations, qui lui garantissent solidité et stabilité.

Le nombre douze renvoie à Dieu, mais aussi aux douze tribus d’Israël, et aux douze apôtres. Elle récapitule ainsi la Première et la Nouvelle alliances.

Ses dimensions sont hors du commun : 12 000 stades équivalent à 2 000 km. Elle forme un carré parfait. Dans une de ses prédications, Martin Luther King a fait une lecture allégorique, disant que la longueur de notre vie correspondait à notre appel à nous aimer nous-mêmes, sa hauteur à notre appel à aimer notre prochain, et sa hauteur à notre appel à aimer Dieu.

Mais ce qui nous intrigue le plus dans cette nouvelle Jérusalem, c’est qu’elle n’est pas pourvue d’un sanctuaire. Le Temple a disparu.

A l’époque où le livre de l’apocalypse a été écrit, le Temple de Jérusalem n’existait déjà plus. Il avait été détruit un quart de siècle plus tôt par les troupes romaines.

On aurait pu s’attendre à ce que notre auteur, dans sa description d’une Jérusalem restaurée, nous la décrive pourvue d’un nouveau Temple.

Mais non, notre auteur ne manifeste aucune volonté d’un retour en arrière. Il ne recherche pas un âge d’or qui aurait existé autrefois, avant la destruction du Temple.

A la place il développe cette idée révolutionnaire d’une présence divine immanente, qui habite intégralement la ville. Le lieu saint n’est plus un endroit délimité. C’est toute la ville qui devient Temple.

C’est pourquoi la nouvelle Jérusalem n’a besoin d’aucune lumière extérieure. Elle n’a plus besoin ni du soleil ni de la lune, car elle est habitée par la présence éclairante du Christ, symbolisé par l’Agneau souverain de l’univers. C’est la gloire de Dieu qui l’illumine.

Amen

 

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