Jean 16, 12-15 – La promesse du Saint-Esprit

 

Pasteur Bernard Mourou

Les disciples ont côtoyé Jésus pendant environ trois ans. Ils l’ont vu vivre. Ils ont reçu son enseignement. Ils ont pu lui poser toutes leurs questions.

Ne nous est-il jamais arrivé de considérer cela comme un grand privilège ?

Et pourtant, il ne suffit pas de vivre dans la proximité d’une personne pour la comprendre.

Quand les disciples vivaient avec Jésus, ils ne saisissaient pas toujours ce qu’il leur disait, les évangiles nous le montre à maintes reprises. Certes ils connaissent Jésus, mais imparfaitement, et en définitive il leur restait extérieur.

C’est pourquoi notre texte nous dit que nous sommes plus avantagés qu’eux.

Vraiment ? Pouvons-nous être plus avantagés qu’eux, alors que physiquement nous ne l’avons jamais vu ?

Notre récit se passe un peu avant la Passion. C’est à ce moment-là, pendant cette conversation de Jésus avec ses disciples, qu’est annoncée la venue du Saint-Esprit.

Oui, nous pouvons l’affirmer, nous sommes plus avantagés que les disciples, et c’est grâce à la troisième personne de la Trinité : le Saint-Esprit. Cette réalité est pour nous, qui n’avons jamais vécu dans la proximité de Jésus.

Mais que pouvons-nous dire du Saint-Esprit, dont finalement on parle peu, en tous cas moins que de Jésus-Christ ou de Dieu le Père.

La raison en est que du Saint-Esprit intervient dans l’intériorité et avec une grande discrétion, comme nous le souligne notre texte : ce qu’il dira ne viendra pas de lui-même. Nous ne pouvons saisir que les effets.

Il utilise le temps. Il révèle ce qui a déjà été déposé en nous. Il nous permet de nous ressouvenir de tout ce qui est vraiment important. Il fait une œuvre de clarification.

C’est ce que souligne aussi le théologien André Gounelle quand il dit : L’Esprit ne dit rien, il n’apporte aucune connaissance spéciale, il ne livre aucun contenu supplémentaire de révélation. Il discerne seulement la Parole dans l’Ecriture ou, plus exactement, il transforme l’Ecriture en Parole[1].

Cela met hors-jeu tout ce qui touche de près ou de loin à l’illuminisme, ce mouvement dissident contre lequel les Réformateurs se sont élevés. Pour les illuministes, la venue du Saint-Esprit à la Pentecôte aurait fait entrer les croyants dans une troisième ère de la révélation. On croit alors percevoir toutes sortes de messages supposés venir directement de Dieu, sans aucune médiation.

Ce n’est absolument pas le mode d’action que les évangiles attribuent au Saint-Esprit.

Le Saint-Esprit n’invente rien. Jésus le dit explicitement : L’Esprit reçoit ce qui vient de moi pour vous le faire connaître.

Ce que fait le Saint-Esprit, c’est de recentrer le croyant sur Jésus-Christ.

Dans cette ultime conversation, Jésus laisse entrevoir à ses disciples ce qui se passera après la Passion. Ce qui va venir, il vous le fera connaître. Il leur laisse ainsi entendre que le Saint-Esprit leur donnera de comprendre la nouvelle période qui est, à ce moment-là de l’histoire, est sur le point de s’ouvrir et dans laquelle nous vivons encore aujourd’hui.

Ce dont nous avons le plus besoin, c’est de comprendre les événements du monde et de nos vies. Car nous nous heurtons chaque jour à un réel dépourvu de sens.

Nous le voyons bien dans ce temps où nous sommes submergés d’images : elles ne nous apprennent rien si aucun commentaire les accompagne.

Ce trait de notre époque est un facteur d’angoisse, car bien peu de commentaires pertinents donnent un sens à ce flot d’images.

En effet, tout commentaire digne de ce nom nécessite un temps pour la réflexion et l’analyse.

Si le commentaire suit de trop près l’événement, il ne pourra pas le décrypter. Une distance est indispensable et nous ne l’avons plus ou très peu, tant nous sautons d’une information à l’autre.

Il faut souvent des mois, et même des années, pour saisir le sens de ces images que nous voyons jour après jour.

Le journal télévisé, dont nous avons fêté les soixante-dix ans, n’a pas le recul nécessaire pour éclairer ce qu’il nous montre. Et que dire de l’information sur Internet ?

Non seulement cela ne nous aide pas à comprendre le monde dans lequel nous vivons, mais cet état de fait amplifie notre malaise devant une actualité qu’on ne comprend plus.

Oui, le réel nous résiste. Il reste muet tant que nous ne le décodons pas.

Le Saint-Esprit est ce décodeur. Il nous donne une interprétation du réel. Il replace les choses à leur juste place. Il nous donne une nouvelle perspective. Il nous place dans une position plus privilégiée que les disciples.

Nous pouvons être reconnaissants pour le don du Saint-Esprit à la Pentecôte : désormais il ne  nous manque rien.

Amen

 

 

 

 

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