Luc 2, 41-52 – Soif d’apprendre

 

Pasteur Bernard Mourou

Ce dimanche, comme dans le texte que nous avons lu à Noël, l’évangéliste nous rappelle une nouvelle fois que Marie gardait dans son cœur le souvenir des événements. Ici, il ne s’agit plus de ce que lui ont dit les bergers, mais d’un incident qui s’est produit bien des années plus tard.

Jésus est maintenant âgé de douze ans. Lors d’un pèlerinage à Jérusalem, il échappe à la surveillance de ses parents et reste dans le Temple à discuter de théologie avec des scribes, les spécialistes de la religion.

Aujourd’hui, en matière de religion, les enfants juifs sont considérés comme adultes à treize ans. C’est l’âge de la Bar-Mitzvah. Mais certains indices laissent penser qu’à l’époque de Jésus, la majorité religieuse était fixée non pas à treize mais à douze ans.

Jésus apparaît ici très imprégné de sa tradition car il écoute et questionne, deux attitudes fondamentales du judaïsme.

Jésus a échappé à la vigilance de ses parents pendant trois jours.

Outre sa portée symbolique, le chiffre trois laisse aussi supposer que ses parents ne l’avaient pas cherché dans le Temple tout simplement parce qu’ils ne s’attendaient pas à le trouver là. A ce moment de l’histoire, la future mission de leur fils leur échappe complètement.

Marie et Joseph ont oublié Jésus. Et Jésus a lui aussi oublié ses parents, pour se consacrer à l’essentiel : aux questions spirituelles.

Luc est le seul évangéliste qui a retenu cet épisode. Il n’a pu le recueillir qu’auprès de Marie, qui n’aura certainement pas oublié ces heures d’angoisse et d’anxiété pendant lesquelles elle ignorait où se trouvait son fils.

Cet épisode est lié pour elle à une émotion forte. Cela étant, l’évangéliste a jugé bon de le retenir. S’il précise qu’elle a gardé ces événements dans son cœur, c’est qu’il les considère d’une importance capitale.

Cette importance est soulignée par le chiffre trois – ses parents le retrouvent au bout de trois jours – et par le nombre douze – ces événements arrivent alors qu’il a douze ans. Nous sommes ici dans le symbolisme divin qui fait de cet événement un épisode emblématique.

Il ne fait aucun doute que cet épisode est capital. Mais en quoi l’est-il ?

Quand on y réfléchit, il touche à la question du savoir religieux. Cet épisode met l’accent non pas tant sur la plénitude d’une connaissance qui serait innée, mais sur le désir d’apprendre.

L’important, ce n’est pas de tout savoir, mais c’est de vouloir apprendre. Cette soif de connaissances conduit Jésus à oublier ses parents pendant plusieurs jours.

Mais Jésus ne savait-il pas tout sur Dieu ? Pourquoi est-il allé chercher à se renseigner sur sa tradition religieuse auprès de scribes contre lesquels, une vingtaine d’années plus tard, il mettra ses disciples en garde ?

En fait, Jésus rencontre la finitude propre à tout homme et à toute femme. En tant qu’enfant, il a besoin qu’on lui transmette les éléments de sa tradition.

Jésus voulait approfondir sa tradition religieuse. Il l’a fait avec les moyens dont il disposait. Il a donc fréquenté les scribes et apprendre d’eux. C’est pour cette raison qu’il reste dans le Temple.

Le texte nous dit qu’il s’est assis, ce qui, dans le contexte religieux de l’époque, signifie qu’il s’est mis dans une position de disciple. Il écoute et questionne. Sa quête prend la forme d’un dialogue. Les pédagogues considèrent que c’est la méthode d’apprentissage la plus efficace.

Toute formation exige de l’humilité : il faut reconnaître qu’on ne sait pas tout. Apprendre, c’est recevoir d’un autre et reconnaître des maîtres.

Cela ne l’empêchera pas plus tard de critiquer violemment ces maîtres religieux pervertis. On se souvient qu’il les appelle races de vipères.

Pendant la période de l’Avent qui s’est achevée avec la fête de Noël, nous avons vu comment Jésus avait épousé la condition humaine.

Il n’avait pas la science infuse : il a dû apprendre comme n’importe lequel d’entre nous, à la différence des dieux grecs, qui sortaient du ventre de leur mère complètement constitués.

Luc nous le rappelle : Il grandissait en sagesse, en taille et en grâce, sous le regard de Dieu et des hommes. Tout comme son développement physique, son développement intellectuel s’est fait au fil des ans, et cet épisode met l’accent sur son désir d’apprendre.

Jésus saisissait toute occasion pour apprendre. Est-ce que, comme lui, nous saisissons toute occasion pour apprendre ? nous aussi nous témoignons de cette soif d’apprendre ?

Dans l’esprit du protestantisme, la formation théologique n’est pas l’apanage d’une caste : elle est proposée à tout paroissien.

Je profite de cette occasion pour rappeler l’existence de Théovie dans notre paroisse. Notre Eglise met tout en œuvre pour rendre possible une formation théologique qui permette à chacun de poursuivre sa recherche. Depuis mars dernier, le groupe Théovie se rencontre une fois par mois. Au seuil de cette nouvelle année, j’espère que notre groupe va s’étoffer, car on n’a jamais fini d’apprendre.

Amen

 

 

Contact