7 avril 2019 – Créateurs d’espace ? – Jean 8, v.1-11 – Ch. Hervaud

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Créateurs d’espace ?

La scène se passe au temple.
Jésus s’y rend, tôt le matin, pour enseigner.
Pendant ce temps, un groupe de pharisiens arrive, traînant une femme et la place devant Jésus en lui posant cette question : toi, que dis tu de la loi de Moïse qui ordonne de lapider une femme prise en flagrant délit d’adultère ?

Jésus ne répond pas. En silence, il se baisse et écrit sur le sol.
Eux ils continuent. La femme au milieu d’eux ne dit mot.
Une femme seule au milieu d’une foule en colère, composées en grande partie d’hommes. Une femme coupable, humiliée, jugée par des hommes qui ont fait de la loi un système moralisateur d’où ils peuvent asseoir leur autorité. Une femme dont on se sert pour accuser Jésus.

C’est lui qu’ils jugent, lui à qui ils veulent tendre un piège. La femme n’est qu’un prétexte. Il n’y a d’ailleurs ni son mari, semble t-il , ni son amant, coupable autant qu’elle d’après la loi. Personne pour la défendre, aucun avocat, elle n’est pas au tribunal. Son affaire est classée d’avance. Peu importe les circonstances, sa vie, ses sentiments, si elle a été consentante, ou non.

Elle ne dit rien, sachant que la société l’a déjà condamnée. Et que dire d’ailleurs quand on se sent coupable, jugée et condamnée ? Il n’y a qu’à se taire. Qui vous comprendrait ?

Comme beaucoup de femmes, hier ou aujourd’hui, elle reste silencieuse.
D’un silence qui tue à petit feu. Combien en sont mortes ?
Pour qu’elle parle, il faut que ses accusateurs s’éloignent.
Jésus les déplacent. De ce lieu, les uns après les autres, ils vont sortir avec une question en tête : « que celui qui est sans péché… »Qui peut être sans péché ? Qui en son âme et conscience peut se juger sans faute ?

Jésus ne les accuse pas non plus, il les ramène à eux mêmes .
Alors, les accusateurs se trouvent sur le même plan que l’accusée. Est ce à dire que jésus nous invite à tout effacer, tout pardonner aussitôt la faute commise ? Sans doute pas.

Si nous regardons la situation des femmes maltraitées ou abusées, ou des enfants victimes de violence, par exemple, aujourd’hui dont on parle beaucoup en ce moment, que dire ? Jésus placerait il les victimes et les bourreaux du même côté ?

Il nous est difficile de l’admettre . Et ce n’est pas si facile.
Il nous faut nous souvenir de ce verset dans l’épître aux Romains :
«  tous ont péché, et sont privés de la grâce de Dieu ».

Nous faisons quant à nous la différence entre les humains et pensons qu’il est légitime que le bourreau paye plus que l’être humain ordinaire.
La violence nous répugne, surtout sur des êtres sans défense, comme les enfants, et nous amène à condamner sévèrement.

Alors, il nous est difficile de comprendre l’amour illimité de Dieu.
Et encore moins à le vivre.

« Moi non plus je ne te condamne pas, » dit Jésus à la femme avant qu’elle parte libre et libérée. Moi non plus, moi le Dieu incarné vivant devant toi, je te rends libre de ton passé. Je te libère pour une vie autre.

Dans cette histoire de femme adultère, la victime c’est elle, cette femme blessée par les hommes. Elle qu’on a placé au milieu et dont on se sert. Celle qui a failli mourir de la violence des hommes, et peut être aussi, tout simplement, d’avoir aimé.

C’est à elle que jésus donne une parole de libération, à elle qu’il donne la parole, pour dire quelques mots où elle s’exprime. Car il est indispensable de parler en tant que victime. Peut être qu’après ce court temps de dialogue, elle pourra voir sa vie autrement, la construire à partir de cette libération. Jésus en tout cas, lui a donné des éléments pour orienter sa vie future. Il a fait en sorte qu’elle puisse entendre la voix de l’espérance.

Pour ses accusateurs comme pour elle, un chemin est ouvert, libéré du passé et du poids des fautes quelles qu’elles soient.

Par cette libération pour chacun, coupables ou victimes , il existe peut être un chemin , où une rencontre est possible malgré l’offense.
C’est un chemin que les accusateurs de cette femme n’ont pas emprunté. Peut être par la suite, auront ils l’occasion de se trouver ensemble, au temple, qui sait ? Et cette rencontre pourra les amener à vivre un chemin commun sous le regard de Dieu.

Pour nous lecteur de cette histoire, ou spectateur de drames humains , que ce soit du côté des coupables autant que des victimes , comment créer un espace de dialogue, où ni les uns ni les autres ne soient jugés et puissent continuer à vivre sans trop de souffrance ? Comment favoriser les échanges, ouvrir la voie à l’amour, donner de trouver un chemin éclairé par la lumière de Dieu tel qu’il est écrit dans la suite du texte lu ce matin dans les versets suivant où jésus affirme : «  c’est moi la lumière du monde, celui qui me suit ne marchera pas dans les ténèbres mais il aura la lumière de la vie. »

C’est à cela que Dieu nous appelle, à être des médiateurs, des rassembleurs, des créateurs d’espace où les liens d’amour puissent s’épanouir, où la lumière de Dieu puisse briller dans la nuit de ceux qui cherchent à construire une vie meilleure.

Cette lumière que nous avons trouvé, ne la cachons pas , portons là bien haut , permettons à d’autres de la voir briller sur leur vie.

Amen.

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