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Le partage biblique, lieu de révélation, moment de communion

Depuis quelques années se sont développés dans notre Eglise des groupes de maison qui mettent au cœur de leur rencontre un partage de la bible. Nous l’avons vécu durant 7 ans à Chaumont dans un groupe où, à côté d’un échange de nouvelles et de la prière, le partage biblique était central. Je continue aujourd’hui la même dynamique sur St-Nazaire dans une activité bi-mensuelle et dans des cultes participatifs au cours desquels chacun peut prendre la parole devant le texte projeté sur grand écran. Depuis longtemps déjà, j’ai constaté combien cette démarche apportait un élan particulièrement apprécié, au point que l’ensemble de nos cultes (pour une assemblée de 25-30 personnes), sont aujourd’hui construits autour de cet échange sur un texte biblique.

 

Voici quelques réflexions glanées parmi les participants :

  • un moment d’échange fructueux qui suscite un questionnement et une meilleure compréhension de la Parole.
  • Un partage fraternel enrichissant tant d’un point de vue humain que spirituel
  • pédagogique, instructif et qui pousse à la rréflexion
  • dans les partages bibliques, on se trouve dans la vie, dans l’actualité, mais aussi on rentre dans la pensée du texte, de l’époque de Jésus.

 

Plusieurs méthodes peuvent être utilisées. Je relèverai ici une démarche qui intègre la lectio diniva. C’est la lecture divine chère aux moines, qui apporte une note méditative à la compréhension du texte. Quelqu’un lit l’ensemble du passage. Puis chacun le relit en silence, pour s’en pénétrer, à l’écoute de ce que l’Esprit met en lumière. A la suite du silence, les participants font retentir librement quelques mots, un verset, sans explication ni commentaire : de l’ampleur est donnée à l’écoute de Dieu en nous écoutant les uns les autres.

Dans un deuxième temps, nous entrons dans les questionnements, avec parfois un débat sur un passage difficile. C’est le moment où l’animateur peut poser quelques questions simples et ouvertes. Y a-t-il quelque chose,

  • que vous n’avez pas compris ?
  • qui vous a dérangé ?
  • qui vous a touché ?

Deux autres questions ouvrent ensuite sur l’appropriation personnelle :

  • Qu’est-ce que vous retenez pour vous ?
  • Qu’est-ce que vous aimeriez retransmettre à quelqu’un d’autre ?

 

A ces quelques éléments, il faut rajouter les trois règles d’or de la vie de groupe :

  • Tout peut être dit
  • Aucune critique de personne n’est permise
  • Tous ensemble, nous construisons.

 

Il m’a semblé nécessaire de toujours garder en conclusion un éclairage qui permette d’aller plus loin que les réactions immédiates des uns et des autres. Ce qu’une personne aura travaillé à l’avance apportera un approfondissement dont tout le groupe profitera, et cela d’autant plus que les cœurs et les esprits auront été comme aiguisés par l’implication de chacun.

 

Dernier point, non des moindres, cette écoute communautaire de la bible conduit naturellement à la prière. Il est bon de ne pas négliger cette dimension. Lorsque l’échange a été fructueux et qu’il a ouvert les clefs d’une révélation de la Parole de Dieu, la prière s’élève facilement de la bouche de plusieurs. Cette prière vient mettre un point d’orgue précieux au temps de communion; elle vient aussi sceller ce que plusieurs ont reçu intérieurement; elle replace toute la démarche dans la présence du Seigneur.

 

La démarche de partage autour de la bible est une manière concrète de vivre plusieurs aspects théologiques qui restent d’actualité.

 

A côté de l’exégèse savante apportant des éléments de compréhension pour lire les Ecritures, le partage biblique remets en valeur le fait qu’à travers les Ecritures, lues, comprises et méditées, nous sommes à l’écoute de la Parole que Dieu nous adresse dans le hic et nunc de nos existences. Il s’agit tout à la fois d’apporter à l’ensemble des participants une meilleure compréhension du texte, d’entrer dans la profondeur de la Bible mais aussi d’accueillir cette révélation de Dieu que l’Esprit cherche à nous transmettre à travers les Ecritures. Le but du partage biblique est avant tout de recevoir une intelligence de la foi qui nourrit spirituellement. C’est ce que j’entends dans les propos de plusieurs : « je vais vraiment à la rencontre de Jésus que le groupe me fait découvrir » ou encore « ce ne sont pas des exposés imposés, mais des moments où la Vie du Christ peut trouver un chemin en chacun… grâce à la liberté de l’Esprit ». Et pour celui qui est encore en chemin, le partage biblique peut devenir un lieu d’évangélisation et de découverte de la parole vivante de Dieu.

 

L’échange autour de la bible favorise aussi la libre expression de chacun qui partage sa foi, ses questions, ses doutes. Il permet aux plus timides d’oser prendre la parole dans un lieu sécurisé.

« C’est différent d’une prédication où on se contente d’écouter. Quand on partage à voix haute ce qu’on a compris, on le retient mieux. » dit un jeune.

L’enjeu n’est pas simplement de rendre « plus vivant » l’étude de la bible mais de permettre à chacun de sortir du statut passif d’auditeur-spectateur et de devenir pleinement « acteur ». Ce point touche la question cruciale à laquelle nous renvoie fortement la culture contemporaine, celle de la redécouverte du sacerdoce universel des croyants. Comment espérer que chaque membre de l’Eglise trouve la liberté d’être témoin du Christ dans son quotidien, si déjà dans l’Eglise, il n’a pas la possibilité de s’exprimer librement et d’être un participant actif !

 

Le troisième point que je relèverai, est la dimension fortement communautaire que prend le partage biblique. Il s’agit non seulement d’une réflexion mais d’un véritable cheminement que l’on fait en commun. « Quand j’étudie la bible toute seule, il y a des choses que je ne vois pas mais la réflexion d’une personne va déclencher chez moi une nouvelle réflexion, et c’est comme une avalanche. Partager, cela nous permet de saisir des choses qu’on ne comprend pas tout seul. Les réflexions des autres provoquent des déclics » dit une jeune femme.

« On approfondit ensemble, on s’enrichit mutuellement, on se nourrit. Il n’y a pas de tabou. On peut tout dire sans crainte du jugement des autres. Et parfois, on rigole bien ! C’est revigorant. »

Il y a une dynamique, une énergie mais aussi une compréhension élargie du texte qui caractérise tout particulièrement cette démarche. Certes, il est possible de retrouver ces éléments dans un groupe « laïc » non chrétien, mais dans le cadre de l’Eglise, avec l’action de l’Esprit, ils prennent une dimension particulière en nous introduisant dans la communion les uns avec les autres et avec le Seigneur.

 

Il ne me semble donc pas étonnant que dans plusieurs Eglises locales, le partage biblique prenne le pas sur l’étude biblique traditionnelle. Il correspond à la culture dans laquelle nous sommes entrés où chacun communique pour le meilleur et pour le pire. S’il est intelligemment conduit, loin de conduire à un appauvrissement de la foi, il vient encourager la lecture de la bible en lui donnant une tournure vivante et dynamique. Mais surtout, il participe à bâtir une Eglise de disciples qui sont préparés à partager leur foi et à témoigner de ce qu’ils ont reçu.

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