Jean 15, 1-17 – La promesse

Aujourd’hui est un jour de commencement. En ce premier dimanche de l’Avent, nous commençons une nouvelle année liturgique. Et cette année liturgique commence par un temps d’attente : l’attente de Noël, la venue de Dieu parmi les hommes, temps d’attente rappelée par la couleur violette de la tenture et du signet. Le texte de l’Evangile que nous avons lu nous fait entrer dans cette promesse par ce message que Jésus a adressé à ses disciples.

Ce texte commence par une image bien connue : l’image de la vigne, le cep et les sarments. Puis le texte devient plus abstrait, plus difficile. L’Evangéliste répète plusieurs fois les mêmes mots : amour, amitié, commandement, joie, fruit, avec le risque que tout cela se mélange un peu dans notre esprit.

Pourtant, ce texte difficile nous fait entrer dans une promesse. Alors quelle est cette promesse ?

D’abord, cette promesse ouvre sur la connaissance de Dieu.

Parmi tous ces mots, il y en a un qui revient plus souvent que les autres : c’est celui de l’amour. S’il y a bien une chose qui n’échappe à personne, c’est que le christianisme est la religion de l’amour. Malheureusement, savoir cela ne nous aide pas toujours à vivre cet amour, tant il est vrai qu’aimer les autres n’est ni naturel, ni facile.

Ce qui fait tout l’intérêt de notre texte, c’est que justement, il nous donne une clef pour vivre cet amour dans notre quotidien. Cette clef, c’est la connaissance que Jésus-Christ nous donne de Dieu : Tout ce que j’ai entendu auprès de mon Père, je vous l’ai fait connaître.

Jésus nous fait entendre ce qu’il a lui-même reçu de son Père et nous donne une connaissance de Dieu. Il s’agit d’une obéissance, mais d’une obéissance intelligente, fondée sur l’écoute.

Voilà pourquoi Jésus nous appelle ses amis. L’ami s’oppose à l’esclave. L’amitié suppose la liberté, le contraire de l’esclavage. Au lieu de rendre esclaves, le commandement de Jésus nous libère. La différence entre l’ami et l’esclave tient au fait que l’esclave obéit sans comprendre. Ici, cette amitié repose sur la connaissance que nous avons de Dieu par Jésus-Christ.

Ce nouveau commandement de Jésus, de nous aimer les autres, se fonde sur une présence, sur un enracinement dans la Parole qui nous est révélée. Il ne s’agit plus de faire, mais d’être, simplement en écoutant cette Parole, cette Parole qui nous permet de rester reliés au cep.

Cette promesse est aussi fondée sur le repos.

Dans cette relation d’amitié, Jésus insiste sur l’importance qu’il y a à demeurer. Il nous demande de demeurer dans son amour. Le verbe demeurer suggère à la fois l’idée d’une présence et d’une continuité. Cet amour, nous pouvons nous y installer, nous pouvons l’habiter, en écoutant cette Parole.

Jésus ne demande pas à ses disciples d’imiter ses faits et gestes, de reproduire servilement l’existence qu’il a menée, mais d’imiter la relation d’intimité et d’écoute que lui-même a cultivée avec son Père tout au long de sa vie terrestre.

Il ne nous pousse pas à faire des activités pour trouver notre identité dans ce que nous faisons, mais tout simplement à être, parce que nous avons déjà reçu de lui notre identité. Cette qualité d’être devient alors la source de toutes nos activités.

Il est question d’une relation, de cette relation qui s’établit entre le Père, le Fils et nous. Jésus garde les commandements de son Père et demeure dans son amour. Et nous, nous gardons ses commandements et demeurons dans son amour. Il y a le Père, il y a nous, et entre les deux il y a Jésus, qui fait le lien. Jésus est cet intermédiaire, ce maillon indispensable qui nous empêche de nous refermer sur nous-mêmes.

De même qu’il y a une correspondance entre l’amour du Père pour le Fils et l’amour du Fils pour nous, de même il y a une correspondance entre l’obéissance du Fils à l’égard du Père et notre propre obéissance au Fils. Autant il est vrai que le manque d’amour est le début de tout désordre, autant il est vrai aussi que cette relation d’amour est le commencement d’une véritable harmonie.

Toute amitié implique une fidélité. La vraie fidélité n’est pas une crispation sur ce qui n’est plus, mais c’est un désir qui revient toujours à nouveau et qui renouvelle constamment l’attitude de départ. Dans cette relation d’amitié, il s’agit de vouloir encore et toujours ce que nous avons déjà voulu au commencement.

Notre foi s’enracine ainsi dans une série d’habitudes : que ce soit l’habitude de lire les Ecritures, l’habitude de prier, l’habitude de fréquenter un lieu de culte. Si elle est la marque d’un véritable désir, la répétition n’est pas sclérosante, mais créatrice. Dieu est toujours à découvrir. Il s’agit de créer de l’espace et du temps pour lui, afin de donner un fondement solide à cette amitié qui nous est proposée.

Enfin, cette promesse est source de bénédiction. Cette relation d’intimité avec Dieu ne reste pas sans conséquences : elle produit de la joie et du fruit.

D’abord cette intimité avec Dieu suscite la joie : Je vous ai dit cela pour que ma joie soit en vous et que votre joie soit parfaite. Cette joie, les prophètes de l’Ancien Testament l’avaient déjà annoncée comme le signe du salut pour les derniers temps. Dans le livre d’Esaïe : C’est dans la jubilation que vous sortirez, et dans la paix que vous serez entraînés. Sur votre passage, montagnes et collines exploseront en acclamations, et tous les arbres de la campagne battront des mains. Depuis la mort et la résurrection de Jésus-Christ, nous sommes dans ces temps de joie et de jubilation. Cette joie nous est donnée aujourd’hui. Non comme la récompense de telle ou telle activité, mais comme un don gratuit.

Ensuite, cette intimité avec Dieu produit aussi du fruit. Ce n’est pas vous qui m’avez choisi, c’est moi qui vous ai choisis et institués pour que vous alliez, que vous portiez du fruit et que votre fruit demeure. Nous ne sommes pas invités à nous replier sur nous, mais à nous ouvrir vers l’extérieur, vers tous ceux qui cherchent sincèrement un sens à leur vie. Il nous appartient d’attester auprès d’eux qu’en Jésus-Christ, c’est Dieu qui s’est révélé.

Voilà le précieux secret que nous livre ce texte : si nous avons parfois de la peine à aimer, c’est tout simplement parce que nous ne sommes pas nous-mêmes la source de l’amour. La source de l’amour, elle ne peut être trouvée qu’en Dieu seul, par la connaissance que Jésus nous en donne dans une écoute sereine de sa Parole. La promesse de Noël, c’est cette possibilité d’être relié à Dieu.

Amen.

Bernard Mourou

 

 

 

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