Jean 3, 16-18 – Dieu a tant aimé le monde

Dieu a tant aimé le monde qu’il a donné son Fils unique. C’est peut-être la phrase la plus connue de toute la Bible qui est proposée à notre méditation ce dimanche, une semaine après la Pentecôte, alors que nous entrons dans le temps liturgique de l’Eglise. Ce n’est sans doute pas par hasard si cette phrase est aussi connue : nous avons là un résumé, un condensé, de tout l’Evangile.

Cette phrase-clé, resituons-là dans son contexte. Elle sert d’introduction à une sorte de méditation qui vient juste après l’entretien du pharisien Nicodème avec Jésus. Il a voulu absolument le rencontrer. Pour cela, il est venu lui poser toutes ses questions.

Mais il est venu de nuit, en cachette, pour ne pas être vu en sa compagnie, pour ne pas se compromettre auprès des autres pharisiens. C’est vrai, Nicodème est venu en cachette, et pourtant, tout laisse penser qu’il a une véritable recherche spirituelle et que son questionnement est sincère, parce qu’il est de nouveau question de lui, après la Passion, on le voit apporter de la myrrhe et de l’aloès pour la sépulture de Jésus.

Et Jésus est allé à l’essentiel, il lui a dit qu’il lui fallait naître d’en haut, qu’il lui fallait naître de l’Esprit saint. Les mots de l’Evangéliste sont très simples pour nous faire entrer dans la compréhension de cette naissance d’en haut, de cette naissance qui est l’œuvre du Saint-Esprit.

Je vous invite à entrer dans cette méditation. Dieu a envoyé son Fils dans le monde. C’est l’acte ultime de Dieu pour l’humanité, le dernier, il n’y en aura pas d’autre. Par Moïse, Dieu avait donné à son peuple un code de lois. En donnant son Fils, Dieu accorde désormais à l’humanité un salut parfait.

Dans le texte original, la forme verbale utilisée souligne le caractère historique de cet acte. Ce salut parfait ouvre sur une nouvelle ère, la dernière, parce qu’en Jésus-Christ nous avons tout. L’humanité est donc entrée dans les derniers temps. Oui, il y a déjà deux mille ans que nous sommes dans les derniers temps.

Ces derniers temps sont marqués par un jugement désormais levé. Dieu a envoyé son Fils dans le monde, non pas pour juger le monde, mais pour que, par lui, le monde soit sauvé. Cet acte ultime sauve l’être humain de la condamnation, d’où qu’elle vienne, condamnation des autres sur nous, condamnation de notre conscience. Celui qui croit en lui échappe au Jugement.

Cet acte ultime ne s’adresse plus à un peuple particulier, mais à tout homme. Dieu ne fait pas de discrimination. Ce salut est indépendant de sa condition : il s’adresse aux riches et aux pauvres, aux jeunes et aux vieux, à ceux qui ont des diplômes et à ceux qui n’en ont pas.

Nous sommes frappés par la facilité du moyen qui permet d’y parvenir : tout homme qui croit en lui ne périra pas, mais il obtiendra la vie éternelle. Ce moyen, c’est la foi, un moyen extrêmement simple, à la portée de tous. La seule condition est de croire Dieu.

De la foi, le cardinal Newman soulignait le caractère insaisissable, au point que nous sommes toujours tentés de lui ajouter ce qui ne lui appartient pas : La véritable foi, disait-il, est pourrait-on dire incolore, comme l’eau ou l’air ; elle est le milieu à travers lequel l’âme voit le Christ et l’âme s’y repose et le contemple comme l’air est vu par l’œil. Quand nous sommes tentés de la saisir pour ainsi dire avec nos mains, […] nous lui substituons un sentiment, une idée, une conviction ou un acte de raison sur lequel nous pouvons nous appuyer et gloser. Nous cherchons alors des expériences personnelles plutôt que Celui qui est au-delà de toutes les expériences.

Et dans la même veine, Wilfred Monod allait dans le même sens : On dit communément, expliquait-il, « J’ai la foi », comme si l’on tenait dans sa main une pierre précieuse, comme si la foi était un objet extérieur à nous, un joyau dont on s’empare, et qu’on enferme dans un coffre-fort pour le retrouver quand on veut. C’est là, poursuivait-il, une dangereuse illusion. Il n’y a nulle part, dans l’univers, quelque chose qui se nomme la foi ; il y a seulement des âmes qui prennent une certaine attitude à l’égard de Dieu, qui font un acte de confiance en l’éternelle miséricorde, et cela c’est la foi. 

Oui, ce moyen mis à la disposition de l’être humain est de la plus grande simplicité. Et cette foi, cette confiance qui n’attend pas de preuves, elle ouvre sur l’infini : elle ouvre sur le salut et la vie éternelle.

Le moyen de la foi est simple, et en même tant il n’y en a pas d’autre. Pour entrer dans cette vie éternelle et ce salut, nous n’avons pas d’autre alternative que de croire. C’est le salut par la foi seule, qu’au XVIe siècle la Réforme protestante a remis en lumière.

Oui, la foi est au fondement de notre christianisme. Mais attention, il faut bien comprendre de quelle foi nous parlons. La foi dont il est question ici, ce n’est pas simplement la foi en Dieu, ce n’est pas la foi de Voltaire, qui croyait au grand horloger. Non, c’est la foi qui reconnaît en Jésus-Christ celui qui révèle le Père.

Ce don de Dieu, le don de son Fils, nous pouvons seulement le recevoir. C’est pour cela que la foi est le seul moyen mis à notre disposition : seule la foi nous permet de nous placer dans une attitude d’accueil.

Un don n’est effectif que s’il est reçu par celui à qui il est destiné. Lorsqu’on nous donne un présent, il n’est véritablement un présent pour nous qu’à partir du moment où nous l’acceptons. Nous entrons alors dans un processus d’échange : l’un donne, l’autre reçoit.

Dieu a tant aimé le monde qu’il a donné son Fils unique. L’amour de Dieu pour le monde procède d’un don, le don de son Fils que Dieu a fait à l’humanité et que nous avons juste à recevoir.

Pour terminer, je citerai les mots d’un autre pasteur de la même famille Monod, Adolphe Monod, disait : La foi ne fait que recevoir ; et c’est par cette simplicité du recevoir qu’elle vaut, parce que c’est par elle qu’elle laisse à Dieu toute la gloire du faire[3].

Accueillons donc le don de Dieu pour nous et ainsi à Dieu sera toute la gloire.

Amen.

Bernard Mourou

 

 

 

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