Marc 11, 1-10 – Un moment de grâce

 

Pasteur Bernard Mourou

Ils n’avaient pas encore compris l’Ecriture selon laquelle Jésus devait se relever d’entre les morts…

C’est un fait sur lequel les historiens s’accordent : Jésus est bien mort crucifié vers l’an 30 de notre ère.

Les chrétiens, eux, affirment qu’il est ressuscité. A Pâques, ils fêtent sa résurrection.

La résurrection… Y a-t-il une vie après la mort ?

La foi chrétienne pose là une question qui ne laisse personne indifférent. Tout être humain réfléchit à cela un jour ou l’autre dans le cours de son existence.

La vie après la mort : certains y croient et d’autres non.  Et parmi ceux qui y croient, il n’y a pas que les chrétiens : la plupart des religions parlent d’une vie après la mort. Il arrive aussi que des personnes qui ne se reconnaissent dans aucune tradition religieuse y croient aussi.

Dès le tout premier commencement, les chrétiens ont mis au centre de leur prédication cette croyance en la résurrection. Nous prêchons le Christ mort et ressuscité. Dans les années 50 de notre ère, l’apôtre Paul formulait cela déjà très clairement : Si le Christ n’est pas ressuscité, votre foi est sans valeur, vous êtes encore sous l’emprise de vos péchés.

Mais nous savons aussi que les incroyants disent que les chrétiens s’accrochent à cette idée de résurrection pour se rassurer contre une idée de la mort par trop intolérable. Ils dénoncent une illusion. Oui, beaucoup pensent que cette foi dans la vie éternelle n’est que le produit de l’imagination humaine.  C’est une raison de plus, en ce dimanche de Pâques, pour nous chrétiens de réfléchir à cette question.

Qu’est-ce que la résurrection signifie pour nous ? Quelle conception nous en faisons-nous ?

Les représentations de cette vie après la mort diffèrent d’un individu à l’autre. Alors pouvons-nous en dire quelque chose qui ne dépende pas notre propre subjectivité ? Avons-nous des preuves de la résurrection ? La réponse est clairement non : nous n’avons pas de preuves au sens scientifique du terme.

Et pourtant, nous proclamons la résurrection. Mais en cela nous sommes conscients que nous ne appuyons sur aucune preuve tangible. Tout se passe sur un autre plan : celui de la foi, de la confiance. Et en effet, il n’est pas possible de parler de la résurrection autrement que la foi et dans la confiance.

Et cette foi, cette confiance, elles s’appuient sur les Ecritures, ces Ecritures qui nous disent que le matin de Pâques, le matin de la résurrection, Marie-Madeleine est venue au tombeau. Alors reprenons le récit qui nous en est fait.

Marie-Madeleine monte seule au tombeau et elle fait un constat, elle observe des faits : la pierre qui fermait le tombeau a été roulée et le corps de Jésus n’est plus là. Pour le dire autrement, elle voit un tombeau vide. Cela signifie qu’elle a constaté une absence, et rien d’autre. Le récit ne présente aucune preuve qui s’imposerait à nous.

Marie-Madeleine ne va pas plus loin dans ses observations, et elle en tire une conclusion, mais une conclusion qui n’est pas du tout celle de la foi chrétienne : elle pense qu’on est venu enlever le corps de Jésus, tout comme l’affirmeront plus tard les chefs religieux.

Alors, comment est-on passé de cette conclusion que le corps de Jésus a été enlevé, à la foi en la résurrection telle que le christianisme la proclame ?

Rappelons la succession des événements : Marie-Madeleine n’est pas entrée dans le tombeau, elle est restée dehors, puis elle est allée annoncer ce qu’elle a vu à Pierre et à Jean, qui sont venus en courant et eux ont fait un pas de plus et ont pénétré dans le tombeau.

Cela étant, Pierre fait exactement le même constat : le corps n’est plus là. Mais comme il observe la scène plus attentivement il voit que les bandelettes ont été soigneusement pliées et rangées.

Est-il plus avancé pour autant ? La réponse est non. Comme Marie-Madeleine, Pierre est parti de la réalité visible, qui se révèle insuffisante pour aborder les questions spirituelles.

Tant que nous restons à ce que nous voyons, nous restons dans le domaine des choses matérielles. Or la résurrection n’est pas accessible à nos sens.

Alors, que faire ? C’est là que Jean va nous emmener plus loin. Pour une fois, ce n’est pas Pierre qui a le premier rôle. Comme Marie et comme Pierre, il observe la réalité matérielle, mais il ne s’arrête pas là voit cette scène avec les yeux de la foi : Il vit et il crut, nous dit le texte.

Voir et croire. Ce que Jean voit, comme les deux autres, ce n’est qu’une absence et rien d’autre. Mais il croit, et ce qu’il croit, c’est que cette absence renvoie à la résurrection de Jésus.

Ce récit nous fait entrer dans une grande vérité spirituelle. Nous n’avons pas le constat de la réalité tout seul, nous n’avons pas non plus la foi toute seule, mais nous avons l’observation de la réalité associée à la foi : la réalité matérielle plus la réalité spirituelle.

Nous le voyons, notre foi ne prend pas son origine dans les inventions chimériques de l’imagination, mais dans la réalité observable. Simplement, elle n’en reste pas là. Si nous en restons à la réalité observable, nous n’irons pas très loin, nous resterons enfermés dans le monde de la matérialité.

Il ne s’agit pas de choisir entre la réalité et la foi : il nous faut tenir les deux ensemble : non pas ou bien la réalité, ou bien la foi, mais la réalité plus la foi.

Alors n’ayons pas peur de poser attentivement nos regards sur notre réalité. Mais ne nous arrêtons pas là et allons plus loin, dans la confiance qui naît de la foi.

Et c’est là, lorsque Jean tient ensemble la réalité et la foi, qu’il trouve quelque chose d’inattendu. Oui, quand on met ensemble la réalité et la foi, on peut être surpris, parce que Dieu peut nous surprendre. En mettant ensemble la réalité et la foi, Jean trouve ce que ni lui ni aucun disciple n’attendait : il trouve cette compréhension de la résurrection, et sa vie s’en trouvera changée.

C’est parce que notre foi ne repose pas sur l’imaginaire et le merveilleux, mais sur une confiance qui ne vient pas de nous, que nous affirmons : Le Christ est ressuscité, il est vraiment ressuscité.

Amen

 

 

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