Message du président. Avril 2014

Chers amis,

            

             Peut-on parvenir au jardin du matin de Pâques sans avoir fait halte au sommet du Golgotha ?

             Peut-on goûter à la lumière du matin sans avoir traversé les ténèbres de la sixième heure ?

             Peut-on comprendre le silence de l’aube pascale sans avoir entendu les dernières paroles de la Parole faite chair ?

             Peut-on grandir dans le mystère de la vie ressuscitée sans la cruelle réalité de la vie crucifiée ?

             Sur le chemin de Pâques, sept paroles résonnent et rejoignent nos vies, sept paroles murmurées ou criées dans un dernier souffle, adressées à l’Humain et adressées à Dieu, paroles de douleurs, de paix, d’espérance.

Au sommet du Golgotha, écoutons :

« Père pardonne leur car ils ne savent pas ce qu’il font » Luc 23/34

             Les gestes viennent d’être violents, une croix, des clous, des masses, savaient-ils ce qu’ils faisaient ? Mais avant cela il y a eu des paroles qui ont conduit jusque là : « Crucifie! » a-t-on entendu, savaient-ils ce qu’ils faisaient ? Et avant cela il y a eu un procès « vous avez entendu le blasphème! », savaient-ils ce qu’ils faisaient ? Et cela parce qu’il y avait eu un baiser dans un jardin, savait-il ce qu’il faisait ?

             Jésus pardonne ces gestes de violences, ces paroles qui jugent à tort, ce baiser qui n’en est pas un … Jésus pardonne car là est le coeur de sa mission : Pardonner parce que le Père pardonne et inlassablement annoncer que là se trouve le chemin de la Vie, même cloué sur une croix.

« Aujourd’hui tu seras avec moi dans le paradis » Luc 23/43

             Il y a là plus qu’un pardon, il y a une promesse, un avenir. Il y a là aussi le partage d’un bout de chemin, celui douloureux de l’agonie où résonne déjà l’apaisement de celui du paradis. Jésus ne laisse pas celui qu’il rencontre dans sa réalité aussi enlisée soit-elle dans le péché mais il atteste d’un compagnonnage sur les chemins du Royaume. Et cette annonce n’est pas pour un avenir lointain, elle est pour aujourd’hui. Cheminer ensemble aujourd’hui, Jésus incarne là toute la réalité des Béatitudes.

« Femme voilà ton fils !…Voilà ta mère » Jean 19/26-27

             Jésus prend soin de ceux qu’Il aime et Il le vit en suscitant, en tissant de nouvelles relations, la relation d’un fils et d’une mère qui en humanité ne le sont pas ! Et cette relation est celle de l’Amour qui prend soin de l’autre, qui ne le laisse pas dans sa souffrance, sa solitude, son silence. Le lien n’est pas celui du sang, il est celui de la Grâce, du don de Dieu par Christ. Et ce lien s’accueille, il ouvre un avenir de soutien, de partenariat. En croix, Jésus accomplit la loi de Moïse « Honore ton père et ta mère… » Deut 5/16 et ses jours vont se prolonger dans le pays que Dieu donne, celui de la vie ressuscitée.

« J’ai soif ! » Jean 19/28

             L’homme est là en croix, dans ce moment où se donne la plénitude du Salut, il reste un homme, il ressent la douleur de la soif. L’humanité de Jésus nous est rappelée ici afin que l’annonce du pardon, du royaume, des liens spirituels, ne nous éloignent pas des réalités de notre condition humaine. Le Royaume est là en prémices et non en plénitude, ce « j’ai soif » nous le rappelle. Il y a eu la soif d’Israël au désert comblée par l’eau du rocher. Il y a  eu la soif de la Samaritaine comblée par la parole de Jésus, il y a la soif de Jésus au terme de sa vie « apaisée » par l’âcreté du vinaigre. Dieu, Lui donne une eau qui désaltère.

Enfin sur le chemin de Pâques, écoutons : 

« Mon Dieu, mon Dieu pourquoi m’ as-tu abandonné ! Marc 5/34

« Père, je remets mon esprit entre tes mains » Luc 23/46

« Tout est accompli » Jean 19/30

             Trois paroles intimement liées, tournées vers l’Autre, Celui qui est à l’origine et sait, au delà de ce que l’homme peut savoir, ce qui se vit là. Cet Autre, Dieu, le Père, qui sait là à la croix le pêché cloué, qui sait là à la croix que les hommes ne savent pas en effet ce qu’ils font eux qui croient faire taire le blasphème, éliminer un concurrent… Non ils ne savaient pas ce qu’ils faisaient mais Dieu lui faisait là toutes choses nouvelles accomplissant pour eux et pour nous des merveilles aussi mystérieuses, que cela puisse paraître.

             Dans cette dualité des actes des hommes et de l’oeuvre de Dieu que rien ne peut empêcher, Jésus ressent l’abandon, la solitude, l’absence de Dieu. Il prie avec les mots de ses pères et ose tout dire à Dieu.

             Au coeur de cette honnêteté spirituelle Il pose encore un acte de Foi, Lui qui a reçu son souffle de Dieu, Lui qui a été oint de l’Esprit Il remet dans un acte de confiance à Dieu, ce qui est venu de Dieu. Dieu avait remis à Adam son souffle afin qu’il devienne « être vivant » (Genèse 3/7), Jésus remet son souffle à son Père et son Père accomplira, dans le mystère de la Terre, le don de « l’être ressuscité ».

             Ainsi tout est accompli en humanité, la loi : la mort du péché, l’oeuvre du Salut. Tout reste maintenant à se manifester pleinement mais ce n’est plus l’oeuvre de l’homme, c’est une œuvre nouvelle créatrice, rédemptrice, salvatrice, c’est l’oeuvre de Dieu !

Que fera-t-Il ?

Que dira-t-Il ?

Quel chemin ouvrira -t-Il ?

C’est au jardin, par un matin de printemps, que la Terre le saura :

             « Il est ressuscité comme Il l’avait dit  » Matthieu 28/6

             « Il est ressuscité, Il n’est point ici » Marc 16/6

             « Il est ressuscité, souvenez-vous  » Luc 4/6

             « Marie de Magdala alla annoncer aux disciples qu’elle avait vu le Seigneur et ce qu’Il lui avait dit » Jean 20/18

Au coeur des ténèbres sept paroles se sont faites entendre.

A l’aube une unique parole résonne :

« Il est ressuscité ! »

 

             Beau chemin vers Pâques,

             Beau chemin de Pâques,

             Sur ce chemin le Seigneur nous parle !

 

Pr Olivier FILHOL

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